Bulletins de l'Ilec

Moins de vide et plus de vrac ? - Numéro 485

17/12/2019

L’emballage est l’antigaspi du produit, mais lui-même est un produit qui peut être gaspillé. Entretien avec Bruno Siri, délégué général du Conseil national de l’emballage (CNE)

Gaspillage et emballage, quelle relation ? Certains paquets sont aux trois quarts remplis. Ici le gaspillage ne porte pas tant sur le contenu que sur le contenant…

Bruno Siri : De fait, le consommateur a souvent l’impression qu’il y a un peu trop de vide par rapport à la quantité de produit. Il faut prendre en considération la chaîne d’approvisionnement. Au commencement, il y a la phase de conditionnement. Prenons l’exemple des céréales pour petit déjeuner qui, conditionnées à chaud, remplissent totalement l’emballage : transporté d’un point de production à un point de distribution et de consommation, le produit se tasse dans l’emballage, ce qui fait apparaître du vide. Il n’y a pas d’action préconçue des metteurs en marché pour vendre du vide. La directive européenne 94/62/CE rappelle que l’emballage doit être optimisé en masse ou en volume ; ainsi le vide doit être justifié par un dossier technique aux services de la répression des fraudes.

Vouloir « acheter mieux » en réduisant, par le vrac, le recours à l’emballage ne conduit-il pas à parfois gaspiller plus ?

B. S. : Pour les produits élaborés, yaourts, corn-flakes, etc., l’impact écologique de l’emballage par rapport au couple produit-emballage, notamment en termes de consommation d’énergie ou d’émission de gaz à effet de serre, est en moyenne de 8 %, selon le Commissariat général au développement durable. Acheter mieux tient à la sociologie du consommateur : sa consommation qui peut être d’origine plus ou moins locale, faite ou non maison… Mais rappelons-le, le vrac est toujours emballé : les produits ne tombent pas tout seuls dans les silos, là où le consommateur se sert. Il faut toujours analyser le système complet de l’emballage, car ces produits vendus en vrac sont emballés avant d’être placés dans les silos, même si l’emballage primaire, celui qui emballe le produit proposé à la vente finale, a disparu. Les lentilles, le riz, arrivent non plus dans des sachets de 500 grammes mais dans des sacs de 5 ou de 10 kg. Seul l’emballage correspondant au paquet de 500 grammes disparaît. Prenons soin que les rayons gérés en vrac ne génèrent pas de perte au sol ni de démarque inconnue. Une étude Ademe sur le vrac est attendue en 2020.

Faut-il réduire le gaspillage final au prix d’un surcroît d’emballage (portions individuelles) ?

B. S. : Certes, la portion, ramenée au kilo de produit, génère plus d’emballage. Le CNE a rédigé un document en partenariat avec l’Ademe sur ce sujet il y a deux ans, d’où il ressort qu’il vaut mieux un peu plus d’emballage sur les produits quand cela fait sens économique et environnemental, cela afin d’éviter de perdre des produits. Mais l’emballage n’est qu’un levier parmi d’autres dans la question du gaspillage alimentaire.

La consigne des emballages serait-elle le moyen d’une substantielle économie de matériaux ?

B. S. : La consigne est un moyen financier attaché à un produit, en l’occurrence son emballage, avec pour objectif de faire revenir l’emballage en fin de vie dans un but de recyclage, ou de réemploi.

S’agissant du réemploi, il est très répandu dans les relations interentreprises, avec par exemple les palettes de transport de marchandises, réemployées des centaines de fois à grande échelle et pour des tonnages importants d’emballage. Dans les cafés, hôtels et restaurants, le fût de bière en métal est lui aussi, après nettoyage, réemployé, et il peut être utilisé plusieurs années. Dans les relations producteurs-consommateurs, l’Ademe a démontré l’intérêt environnemental du réemploi dès lors que l’on respecte quelques éléments comme une distance maximale de transport des emballages vides de 200 à 300 km, un taux de retour au-delà de 90 %. L’Ademe a analysé dix expériences de terrain de ce réemploi, notamment celle de la brasserie Météor en Alsace.

S’agissant de la consigne pour recyclage, il y a eu récemment beaucoup de débats sur le sujet, notamment avec le projet de loi économie circulaire, autour de l’objectif d’augmenter par la consigne les taux de recyclage des bouteilles en plastique ; le CNE encourage au suivi de ces débats.

Propos recueillis par J. W.-A.

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