Un enjeu industriel majeur - Numéro 485
17/12/2019
Selon une étude Ademe de 2017 la valeur des gaspillages alimentaires était de 16 milliards d’euros en France, le taux de perte de 4 % de la production agricole, 4,5 % de la transformation, 3,3 % de la distribution et 7 % de la consommation (restauration hors foyer comprise). Dans ses travaux de 2019, l’Ademe estime qu’en France dix millions de tonnes de nourriture consommable sont gaspillées, soit 150 kg par habitant et par an – dans les ordures ménagères, 20 kg de denrées gaspillées, d’une valeur de 108 €, dont 7 kg de produits encore emballés.
Mais dans le non-alimentaire ? Combien de produits gaspillés du côté des détergents et des cosmétiques, entre les surdosages de lessives ou de shampoing, les parfums offerts et jamais portés, les protections solaires oubliées sur la plage, les bougies d’anniversaire à peine consumées, etc. ? Il n’y a pas de quantification équivalente pour ces familles de PGC, au stade ultime de leur consommation. Ni de l’évolution de leurs modes de consommation depuis que des industriels se sont employés par exemple à orienter le marché vers des usages mieux maîtrisés en introduisant des formules concentrées (et souvent plus économes d’énergie, ou prévenant le gaspillage d’emballages par des conditionnements rechargeables).
C’est en général au niveau de la production, soulignait l’Ademe en 2017, que les pertes en volume sont les plus importantes et les plus difficilement récupérables. Difficile mais pas dissuasif. La réduction des pertes et gaspillages intéresse tous les industriels de PGC : une enquête conduite par l’Ilec en 2019 parmi ses adhérents montre que neuf entreprises sur dix ont mis en place des actions contre le gaspillage à leur niveau de la chaîne d’approvisionnement, et parmi elles plus de huit disposent d’outils pour mesurer l’effet de ces actions.
Une enquête de l’Ilec sur les actions de ses adhérents
Quel est l’enjeu ? Les PGC sont disparates, et leurs intrants trop divers pour que les amalgamer ait grand sens. L’enquête Ilec permet seulement d’avancer que la médiane des tonnages gaspillés ou perdus se situe entre 0,5 et 1 %.
En termes d’ancienneté des actions menées et de quantification, les grandes entreprises du secteur alimentaire sont plus avancées que celles du non-alimentaire ; elles n’ont pas attendu la loi de 2016 pour agir, même si elles voient dans celle-ci un catalyseur qui a contribué à porter la problématique du gaspillage au rang des priorités stratégiques. Taille oblige, et il en va sans doute différemment de beaucoup de PME, en manque de moyen pour le diagnostic et la mise en œuvre : à la suite de son opération « IAA témoins » sur dix-neuf sites industriels de l’agroalimentaire, l’Ademe estimait dans un communiqué du 12 mars dernier que la moitié des entreprises en France ne connaissent pas leurs pertes de matières et que neuf sur dix ignorent le coût associé.
Reste que la nature des actions menées au stade de la production pour réduire les pertes n’est pas différente dans les PGC non alimentaires (périmètre Ilec) : elle concerne la gestion des stocks ou l’optimisation du processus et du matériel.
L’enquête Ilec révèle les principaux foyers de pertes : d’abord des erreurs internes lors de la production, de l’emballage ou de l’étiquetage ; ensuite les refus de marchandises par les clients distributeurs, puis les dysfonctionnements de machines ou les emballages des matières premières. En alimentaire, les erreurs sur les lignes de production sont la première cause de gaspillage ; en non-alimentaire, ce sont les refus de marchandises.
Pour la plupart des grandes entreprises de PGC, l’amélioration de la gestion des stocks est le premier levier actionné, devant l’optimisation des lignes de production, les travaux de maintenance ou le renouvellement du matériel. Neuf sur dix ont mis en œuvre des actions de sensibilisation de leur personnel dans les usines, voire au-delà des usines (sept sur dix) ; et un tiers s’emploient à sensibiliser aussi leurs fournisseurs, leurs clients distributeurs ou les consommateurs. Près de neuf sur dix donnent à des associations tout ou partie de leurs volumes perdus pour la vente.
François Ehrard