Portugal : Succès relatif du code - Numéro 321
01/02/2001
Quel est le rôle et quels sont les pouvoirs de la Commission que vous présidez ? Luis Pais Antunes : La Commission permanente d’évaluation et de surveillance (CPES) a été créée dans le cadre du Code des bonnes pratiques commerciales (CBPC) signé entre la Confédération de l’Industrie Portugaise (CIP) et l’Association Portugaise des Entreprises de Distribution (APED) le 17 juillet 1997. Le CBPC établit un ensemble de principes généraux qui doivent régir les relations entre les associés des parties, ainsi que les règles et les procédures applicables dans le cadre de ces relations. La CPES est composée de deux représentants de chacune des parties et d’une personnalité indépendante, choisie d’un commun accord par les parties, qui préside à la Commission. La CPES a pour rôle d’évaluer et de surveiller l’application du Code ; de proposer aux parties les modifications du Code qu’elle estime nécessaires ; d’émettre des interprétations sur l’application générique du Code et d’adopter des recommandations sur l’application pratique de celui-ci. Quelles solutions propose-t-elle à la résolution des conflits ? Luis Pais Antunes : Outre l’interprétation des dispositions du Code et les recommandations sur des cas concrets qui lui sont soumis par les parties, la CPES joue également un rôle important en tant que forum de débat sur des problèmes concrets auxquels les associés des parties doivent faire face. Souvent, les orientations dégagées ne prennent pas la forme de recommandations au sens stricte, mais sont plutôt inscrites sur le procès-verbal de la réunion au cours de laquelle elles ont été adoptées et, par la suite, communiquées aux associés des parties par celles-ci. Quels obstacles rencontrez-vous à la mise en œuvre du code ? Luis Pais Antunes : Il y a deux sortes d’obstacles auxquels la CPES doit faire face : • d’une part, le caractère juridiquement non contraignant de ses recommandations. En effet, les associés des parties ne sont pas liés par les délibérations de la CPES. • d’autre part, un nombre non négligeable de conflits entre les associés des parties passe en quelque sorte “à côté” de la CPES, soit pour des raisons d’intérêt commercial, soit pour des raisons de confidentialité. En tout état de cause, le bilan à faire des activités de la CPES au cours de ces trois premières années d’activité est, à mon sens, un bilan positif, dans la mesure où elle a clairement contribué à réduire les tensions entre les parties et leurs associés et à établir les bases d’un règlement à l’amiable des principaux conflits. Quels sont les avantages et les inconvénients d’un code par rapport à la législation et à l’intervention des autorités publiques ? Luis Pais Antunes : Il est certes vrai qu’il existe actuellement un déficit d’intervention de la part des autorités publiques, notamment au niveau des relations entre les fournisseurs et les distributeurs. Mais il n’en reste pas moins que la législation n’est pas toujours à même de contribuer au règlement d’un nombre important de conflits entre les principaux acteurs de la distribution. Il est donc important que les entreprises du secteur, représentées par leurs associations respectives, soient en mesure de faire face à un certain nombre de questions au niveau de l’auto-régulation. Par ailleurs, le délai de prise de décision dans un système d’auto-régulation est bien plus court que celui dont les autorités publiques ont normalement “besoin” pour prendre une décision. Evidemment, il y a également des inconvénients. Le plus visible est, sans doute, celui qui tient au caractère juridiquement non contraignant des délibérations de la CPES. Mais, dans la pratique, et dans le cas spécifique du Portugal, je considère que l’inconvénient le plus important du système mis en place est l’absence de représentation d’un nombre important d’entreprises de la distribution qui ne sont pas associées de APED (par exemple, Makro, centrale d’achat). Un système de plaintes a-t-il été mis en place ? Luis Pais Antunes : Le règlement de la CPES prévoit que non seulement les parties, mais également leurs associés ainsi que d’autres entités qui aient adhéré au Code puissent saisir directement la CPES. Toutefois, dans la pratique, un tel accès se fait toujours par le biais de l’association qui les représente. Il a donc existé, jusqu’à présent, une sorte de “filtre” entre les entreprises et la CPES. A mon avis, ceci n’a pas constitué un véritable problème. Mais je considère qu’à l’avenir, le système d’auto-régulation devra évoluer de sorte qu’il puisse fonctionner également comme une instance arbitrale. Dans un tel cas de figure, il faudra prévoir que l’accès direct devienne une réalité. Autrement, il me semble qu’il a un risque d’enlisement dans les travaux de la CPES. Les sanctions sont-elles possibles et appliquées ? Luis Pais Antunes : Le système, tel qu’il est conçu actuellement, ne prévoit pas la possibilité d’application de sanctions. Très probablement, de telles sanctions trouveront leur justification au cas où l’actuel système d’auto-régulation évolue dans le sens d’un système arbitral ou quasi-arbitral. Depuis 1997, la réalité économique a changé. Le Code en tient-il compte et quelles ont été ses recommandations ? Luis Pais Antunes : Tel qu’il a été rédigé, le Code est toujours pleinement applicable et donne aux parties les instruments dont elles ont besoin pour faire face aux nouveaux problèmes que le changement de la réalité économique nous a apportés, si elles le veulent. Plutôt que le texte du Code lui-même, c’est au niveau du rôle des pouvoirs et des règles de fonctionnement de la CPES que des modifications pourraient se justifier. Mais ceci est clairement une matière du ressort des parties, dont, j’en suis sûr, elles en discuteront à brève échéance. Outre ses délibérations sur des questions ponctuelles, la CPES a adopté plusieurs interprétations et recommandations couvrant notamment les domaines suivants : application des barèmes de prix et politique de ristournes ; modifications des conditions contractuelles négociées ; processus de transition vers l’euro ; conditions générales d’approvisionnement d’entreprises de la distribution.
Jean Watin-Augouard