Grande-Bretagne : vers un code de bonnes conduites en avril 2001 - Numéro 321
01/02/2001
L’Office of Fair Trading a commis un rapport sur les “supermarkets” et certaines de leurs pratiques jugées contestables. 52 cas litigieux ont été recensés. Quelles sont, selon vous, les conduites les plus pernicieuses ? Michael Hutchings : De fait, 52 pratiques ont été identifiées dans l’annexe 11-3 (paragraphe 2.548) du rapport. Trente sont de nature anticoncurrentielle et pour 25 d’entre elles, les effets pervers sont plus importants que les effets bénéfiques. Les pratiques les plus pernicieuses sont, à mon avis, les suivantes : • exiger de la part des fournisseurs un paiement comme condition pour stocker et mettre en rayon, pour des têtes de gondole et pour accroître le nombre de références (2,3,4) ; • demander aux fournisseurs une contribution financière pour que leurs produits soient promus dans les magasins (9) ; • influencer un fournisseur afin qu’il ne livre pas son produit à un autre détaillant (37) ; • demander aux fournisseurs une contribution pour les réductions anticipées (10,11) ; • obtenir de la part du fournisseur des informations sur ses conditions de vente aux autres détaillants (35) ; • débiter les factures des fournisseurs sans leur accord (12,44) ; • prendre l’initiative d’une promotion et demander aux fournisseurs de la financer (47) ; • déréférencer un produit de marque en faveur d’un produit marque distributeur (31) ; • obliger un fournisseur à financer des promotions telles que “un payé, un gratuit” (45). La puissance d’achat des “Big Five” est-elle excessive et quels sont ses effets pervers ? Michael Hutchings : la commission de concurrence a conclu que tout détaillant, ayant une part de marché supérieure à 8%, a une puissance d’achat excessive qui doit être contrôlée. Les effets pervers des pratiques anticoncurrentielles des commerçants ayant une part de marché supérieure à 8% sont développées plus particulièrement dans le point (2.543) : “beaucoup de fournisseurs ne peuvent pas résister à ces pratiques. Elles ont pour effets pervers le fait que ces derniers consacrent moins de temps à construire leur marques et à introduire de nouveaux produits et par conséquent, ils manquent d’innovation… Nous pensons également qu’à plus long terme, les pratiques des plus grands distributeurs font peser une menace sur les ressources des fournisseurs plus faibles et peuvent les éliminer du marché… Il en résulte une diminution de la qualité et du choix pour le consommateur.” L’Office recommande la création d’un code de bonne conduite dont il superviserait l’application. Quel serait son champ d’application. Quelles solutions préconiser pour résoudre les conflits ? Michael Hutchings : Le communiqué de presse du secrétaire d’Etat, en date du 10 octobre 2000, s’applique aux cinq grands distributeurs et sera mis en application par l’Office of Fair Trading. Nous ne savons pas, à ce jour, quelle sera la procédure en cas de contestation. Quels obstacles peut-on rencontrer à la mise en œuvre du code ? Michael Hutchings : Ils sont nombreux. Toutefois, je pense que le code sera mis en place sans trop de difficultés. Nous le saurons dans les prochaines semaines. Quels sont les avantages et les inconvénients d’un code par rapport à la législation et à l’intervention des autorités publiques ? Le volontarisme est-il préférable à la loi ? Michael Hutchings : Le code sera plus flexible et sera revu au bout de trois ans. Il peut être mis en place rapidement - dans les six mois - alors qu’une loi mettrait plusieurs années. Cela peut conduire plus facilement à une résolution des conflits plus rapide qu’une loi qui, généralement, mène à des procès. Elle sera mieux acceptée par toutes les parties car le code aura été discuté entre elles. Un système de plaintes a-t-il été mis en place ? Michael Hutchings : Pas encore. Les sanctions sont-elles possibles et applicables ? Michael Hutchings : Oui, mais nous ne savons pas encore ce qu’elles seront. Si la conduite est suffisamment mauvaise, l’OFT peut imposer des amendes en vertu de la loi sur la concurrence de 1998. Comment évolue le rapport de forces entre distributeurs et fournisseurs ? Michael Hutchings : Un rééquilibrage doit être attendu de la publication du rapport. Les distributeurs devront, sans aucun doute, être plus prudents avant de s’engager dans des activités anticoncurrentielles.
Jean Watin-Augouard