Traçabilité, du champ à la table - Numéro 433
01/03/2013
Résumez-nous en quelques mots l’action de RSE pour laquelle votre société a été distinguée par le jury de l’Essec.
Romain Nouffert : Le prix « Gestion des ressources naturelles » a récompensé l’huile Fleur de Colza de Lesieur, mais aussi et surtout toute une filière de femmes et d’hommes. Dans cette bouteille, haute en couleur, il y a, si on peut dire, plus de mille agriculteurs français qui composent cette filière. Fleur de Colza est un produit au service des consommateurs, riche en omégas 3 de qualité qui reflète concrètement l’exigence de notre cahier des charges. Une série d’engagements, élaborée en étroite collaboration avec l’ensemble des acteurs de la filière, depuis presque dix ans, s’organisent autour de quatre piliers, fondamentaux pour Lesieur : une production cent pour cent française, avec des graines qui proviennent du Centre, de l’Ile-de-France et de la Bourgogne ; la qualité dès la semence, avec des agriculteurs qui utilisent des variétés de graines de colza parmi les plus riches en oméga 3, pour obtenir une huile de première pression ; l’attention à l’environnement au cœur de l’activité ; la traçabilité maîtrisée de toutes les étapes de production, du champ à chacune de nos bouteilles. Cette démarche est contrôlée par un organisme indépendant, Protectial, qui assure la certification. D’autres organismes, comme Bleu-Blanc-Cœur ou la Fondation Nicolas Hulot, jouent un rôle de conseil.
Proposer aux consommateurs un « produit filière », depuis l’agriculteur jusqu’à l’assiette, peut-il être considéré comme une stratégie qui dépasse les obligations de l’entreprise ?
R. N. : Aujourd’hui, l’organisation en filière pour la fabrication d’un produit ne fait pas l’objet d’une obligation réglementaire spécifique. Il s’agit d’une vraie volonté de la part de Lesieur de contrôler chacune des étapes de fabrication de l’huile Fleur de Colza.
Fleur de Colza, une initiative qui prouve que l’on peut conjuguer écologie et économie, développement durable et développement des ventes ? Ce type d’action vise-t-il aussi à être un avantage concurrentiel ?
R. N. : Ce modèle est unique sur le marché des huiles alimentaires et représente un réel avantage compétitif pour la marque, face à ses concurrents sous marques de distributeurs. Sur ce point, la meilleure preuve est le plébiscite de nos consommateurs. Fleur de Colza a progressé de façon exceptionnelle depuis 2011, + 8 % en volume. Ce succès se traduit en part de marché (volume) : en 2012, Fleur de Colza atteint 29,3 % , soit + 1,8 point par rapport à 2011 (source : panel Nielsen, CA mensuel décembre 2012).
L’audit du cahier des charges par des experts externes vous a-t-il conduit à le modifier ?
R. N. : Au départ, la démarche a consisté à mettre en place un cahier des charges qui engage les différents partenaires : Lesieur, agriculteurs et coopératives. Il impose des règles strictes et opérationnelles sur la sélection des variétés de graines, mais aussi sur les conditions de production. Il garantit ainsi une homogénéité des pratiques culturales pour un produit de qualité constante. L’un des enjeux de la filière Fleur de Colza est d’être en capacité d’agir sur chaque étape, de la graine à la bouteille, pour optimiser de façon continue la qualité et les aspects environnementaux. Cette charte fait l’objet d’améliorations, d’échanges continus et de contrôles réguliers par des organismes indépendants comme la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme, et l’association Bleu-Blanc-Cœur. En 2010, ces deux partenaires ont participé à l’audit du cahier des charges et restent depuis impliqués, afin de « challenger » notre démarche et la faire évoluer en permanence.
Ce premier « produit filière » de Lesieur va-t-il inspirer des politiques de filière similaires pour les autres produits du groupe ?
R. N. : Fleur de Colza, et sa filière, constitue aujourd’hui un des marqueurs emblématiques du changement au sein de Lesieur et de Sofiprotéol. L’intégration de l’amont agricole par la marque fait désormais partie des bonnes pratiques citées en interne. Il a valeur d’exemple pour le développement de projets à venir. La filière Fleur de Colza se positionne comme une locomotive capable de faire progresser les autres produits avec une démarche d’amélioration continue. En garantissant l’origine française de ses produits piliers (Lesieur Cœur de Tournesol, Pépins de Raisin), en valorisant la qualité des œufs de poules élevées en plein air dans ses mayonnaises, en s’engageant sur une organisation permettant l’extraction des huiles d’olive moins de vingt-quatre heures après l’arrivée des olives au moulin, Lesieur déploie progressivement une stratégie de maîtrise de ses différentes filières au service de la qualité organoleptique et nutritionnelle, et de la transparence des phases de production. En parallèle, Lesieur Cristal, filiale de Sofiprotéol au Maroc, possède sa propre oliveraie.
Cet engagement a-t-il fédéré d’autres soutiens d’entreprises que celui du groupe fondateur ? Même parmi des concurrents ? Des clients ?
R. N. : Plus qu’un soutien, c’est notre appartenance au groupe Sofiprotéol, l’acteur principal de la filière des huiles et protéines végétales, qui nous permet d’être au cœur du monde agricole français, et de bénéficier d’un atout incontestable pour bâtir un cahier des charges unique. Les consommateurs exigent des engagements concrets de la part des marques, et nous constatons en effet, depuis quelque temps, des demandes spécifiques de plusieurs de nos clients de la restauration hors foyer ou de clients industriels, qui souhaitent bénéficier d’approvisionnements en colza issu de la filière Fleur de Colza. Leur but, en cela, est de communiquer autour de leurs engagements auprès de leurs propres clients, les consommateurs.