Diversité des attentes et des niveaux de consommation - Numéro 469
12/12/2017
La tendance dans un grand groupe de PGC comme Bonduelle a-t-elle été ces dernières années au développement d’une offre multinationale plus homogène avec quelques produits nationaux de niche, ou à une arque globale en Europe ?
Agnès Dion : Nous avons deux marques principales, Cassegrain, marque franco-française, et Bonduelle, marque internationale. Historiquement, la marque Bonduelle s’est développée à travers le monde et particulièrement en Europe de manière très locale. Bonduelle a été une des premières marques à s’installer dans les pays de l’Est, juste après la chute du mur de Berlin, en 1990. Nous sommes sur un marché alimentaire, avec des produits au centre du repas, nous devons nous adapter aux attentes et cultures culinaires locales, très diverses selon les pays. Certes, nous proposons des petits pois, du maïs et des produits consommés dans plusieurs pays, mais les goûts demeurent locaux : les petits pois sont préférés extrafins et d’un goût plus sucré en France qu’en Allemagne. Aux Pays-Bas, les consommateurs sont très attentifs à la teneur en sel.
Vos usines sont-elles locales ?
A. D. : Nous avons des usines dans différents pays d’Europe, elles sont spécialisées par zones de production de légumes, car ils ne poussent pas partout : pour l’aubergine, nous produisons dans les pays du Sud, au Portugal, alors que pour le céleri nous produisons en Pologne. Bonduelle, entreprise française, demeure exportatrice, car nos zones de production et nos usines sont principalement basées en France. Nous sommes sur un marché très différent selon le pays, notamment par la différence de niveau de consommation par habitant : en moyenne 12 kg de conserves de légumes par habitant en France, moins de trois en Espagne… La structure du marché aussi est très différente : en France, le haricot vert représente près de 30 % du marché, pour 5 % en Italie, alors que les légumes secs représentent le gros du marché italien. Ajoutons que nous n’avons que des concurrents locaux, la marque Bonduelle étant la seule internationale. Les habitudes des consommateurs et les cultures culinaires sont spécifiques à chaque pays. La force de Bonduelle réside dans sa capacité à s’adapter aux goûts locaux.
Combien les structures locales de Bonduelle dans le monde commercialisent-elles de produits identiques sur plusieurs marchés nationaux ? Et de marques de produits identiques ?
A. D. : Concernant les produits, le maïs est le plus international, mais avec des adaptations selon les marchés, un peu plus de sel ici, moins ailleurs. Les autres produits sont plutôt différents. La marque Bonduelle est internationale, mais elle a une histoire différente selon les pays, avec une communication elle aussi adaptée aux attentes locales.
Vos MDD ou « marques clients », selon l’expression de Bonduelle, ont-elles vocation à répondre aux goûts locaux ?
A. D. : Oui, nos clients distributeurs créent également leur gamme pour répondre aux attentes locales. C’est plus ou moins facile, selon qu’ils souhaitent optimiser leurs achats de manière européenne ou non. Sur nos marchés, nous avons beaucoup de marques de distributeurs qui misent sur le local.
Pour la marque commune à plusieurs marchés, y a-t-il des difficultés spécifiques de positionnement ou de composition de produits résultant de structures de coûts ou des conditions de mise à disposition disparates ?
A. D. : Beaucoup de nos produits sont fabriqués sur une saison très courte, au mois de juin par exemple pour les petits pois, mais on obtient différents niveaux de qualité (fins, très fins, extrafins…) et on cuisine les jus en s’adaptant aux goûts des consommateurs visés. Ce ne sont pas pour nous des difficultés, puisque nous sommes habitués à nous adapter en permanence au goût de chaque pays et aux gestions de multiples gammes.
Quel est le poids des aspirations locavores dans votre stratégie ?
A. D. : Elles sont essentielles, principalement en Europe du Sud, et surtout en France. En ce qui nous concerne, 95 % de nos produits vendus en France sont d’origine France. On l’inscrit d’ailleurs sur nos emballages, car c’est un facteur clé dans les motivations d’achat des consommateurs. Par ailleurs, le groupe Bonduelle est très attaché à ses pratiques culturales et au respect de l’environnement. Nous sommes fiers de la façon dont nous travaillons, car nous avons fait des choix durables qui font la différence. Nous développons de nouvelles techniques d’agriculture pour limiter les intrants, nous menons des programmes pour réduire notre consommation d’eau et d’énergie. Nous focalisons notre attention sur cet axe majeur, qui fait partie de notre singularité depuis toujours. Et nous avons créé la fondation Louis Bonduelle, pour promouvoir une meilleure alimentation.
L’idée de marque mondiale fait-elle toujours sens en dehors du luxe ?
A. D. : Oui, bien sûr, une marque mondiale a tout à fait sa raison d’être dans l’univers alimentaire, car les consommateurs traversent de plus en plus les frontières. Si les produits peuvent être différents selon les pays, la marque, elle, est commune et porte les mêmes valeurs. Les synergies sur la production, les opérations, le marketing et le commerce, permettent à ces marques de répondre encore mieux aux attentes et de continuer à innover.
Propos recueillis par J. W.-A.