Terres OléoPro, marque-filière enracinée
12/01/2017
Depuis 2014, Terres OléoPro se veut témoin et médiatrice auprès des consommateurs de la création de valeur des 200 000 acteurs de la filière des huiles et protéines végétales.
par Jean Watin-Augouard
Transparence. Un objectif prioritaire, selon Antoine Henrion, président du GIE Terres de Communication 1. Les quelques chiffres présentés dans l’encadré témoignent de l’évolution des attentes des Français auxquelles il semble urgent de répondre 2. C’est ce qu’entendent faire les agriculteurs réunis au sein de Terres OléoPro – Oléo pour « oléagineux » et Pro pour « protéagineux » 3 –, la marque filière des huiles et protéines végétales créée en février 2014. Elle réunit 200 000 agriculteurs, éleveurs et industriels 4, mais aussi semenciers, organismes stockeurs, transformateurs… et marques. « L’arrivée de Terres OléoPro dans les rayons matérialise à la fois l’aboutissement d’un travail qui a mobilisé l’ensemble des acteurs de la filière pendant deux ans et le renforcement du lien entre agriculteurs et citoyens, qui est notre motivation première, explique Antoine Henrion 5. Elle est souhaitée par les agriculteurs, qui révèlent ainsi leur savoir-faire et partagent leur passion des métiers de la terre. »
Une seule voix dans l’engagement pour l’avenir de l’agriculture
Transparence signifie également traçabilité et visibilité du monde agricole. Les Français savent-ils qu’ils consomment chaque jour des huiles végétales, aussi bien dans les plats, ce qui semble logique, que dans les savons, crèmes, dentifrice et… mousse à raser ? « Nous souhaitons une agriculture ouverte, transparente et interactive avec tous les acteurs de la filière » mais également avec les consommateurs, qui ont découvert la marque en 2015 grâce à une campagne de presse. C’est pour répondre à leurs attentes concernant l’origine et la qualité des produits alimentaires que fut annoncée à l’occasion du Salon international de l’agriculture 2016 la création d’une charte d’engagements conçue pour les marques dont les produits utilisent des graines oléo-protéagineuses. À travers ses 21 engagements depuis la graine jusqu’au produit, le cahier des charges impose de garantir l’origine France des produits issus de l’agriculture pour préserver le capital sol 6, les bonnes pratiques agricoles et industrielles 7, la protection de l’environnement et des ressources naturelles 8, le progrès continu et l’innovation (R&D) – grâce à Terres Inovia –, et l’engagement social et sociétal pour le bien-être des hommes, et en particulier des agriculteurs – en leur assurant la santé, la sécurité et la formation à tous les stades de la chaîne de valeur. « Par bien-être, il faut entendre passion, car sans elle on ne peut transmettre nos engagements », précise Antoine Henrion, lui-même agriculteur. Le respect du cahier des charges est contrôlé par un organisme de certification indépendant.
Du champ à l’assiette
« Terres OléoPro n’est pas un label qualité comme Label rouge, c’est une marque caution qui entend bien identifier les acteurs de la filière », précise Florence Doat-Matrot, directrice du GIE Terres de Communication. Les produits concernés mettent en avant le logo Terres Oléopro sur leur emballage et dans leur communication. Les objectifs sont de créer davantage de lien entre agriculteurs et citoyens, et de garantir des produits de qualité d’origine française, élaborés de manière responsable. La marque d’huile de table Fleur de Colza est la première à adhérer en 2015 à la démarche : depuis avril 2016, six millions de bouteilles ont arboré le logo. L’usine Saipol (groupe Avril) de trituration de graines de colza 9, située au Mériot dans l’Aube, a rejoint Terres OléoPro le 12 juillet 2016. Mais il n’est de marque sans notoriété, aussi la marque-filière-caution dispose-t-elle d’un budget de communication en conséquence. La publicité s’est d’abord déployée en cinq thèmes, sur différents médias : « Notre colza est sur la tartine d’Eline… dans la crème de Myriem… dans le dentifrice de Mathis ». « Nous avons sponsorisé la météo sur France 3 région et BFM TV, nous avons été présents dans la presse – Le Journal du Dimanche, Paris Match, 20 Minutes, Le Point, 366 communities –, ce qui nous a donné les quelque 62 millions de points de contact nécessaires pour créer de la notoriété, sans oublier les réseaux sociaux – ceux du Figaro, de TF1, du Monde et de L’Express. » La communication digitale se décline également sur le site de la marque, Twitter, Facebook et ses 45 000 fans, et prochainement sur Instagram. « Nous allons lancer une web-série, Paroles de terres, qui donnera la parole aux agriculteurs sur YouTube, Facebook, Instagram… », ajoute-t-elle.
Terres OléoPro, une marque filière médiatrice
Une étude qualitative menée auprès de consommateurs sur la démarche de labellisation de Terres OléoPro souligne, de manière générale, l’importance des mentions sur l’emballage, le premier vecteur, et la priorité donnée à la santé – non toxicité et nutrition – sur l’environnement et le social. « Conditions nécessaires mais non suffisantes pour recréer de la confiance, quatre domaines d’information centrés sur la naturalité : l’origine, les conditions de transformation, celles de production et la composition des produits », rappelle Fabienne Silvestre, son auteur. L’étude souligne que le label est considéré comme un signe tangible de qualité qui donne aux marques « un gain en responsabilité et fiabilité ». Aussi Terres OléoPro est-elle « appréciée sur le principe, la population agricole bénéficiant d’une image positive ». Les marques qui apposent le label sur leur pack sont alors considérées comme « médiatrices entre production et consommation sur l’axe sélection des ingrédients sûrs et de qualité ». Elles gagnent en confiance et en attractivité. Mais, prévient Fabienne Silvestre, « il faut éviter la surpromesse de naturalité dans un contexte d’attentes fortes. » Dans Terres OléoPro, Pro ne peut-il également signifier « professionnel » ?
Notes
(1) GIE Terres de Communication : le hub de communication de la filière française des huiles et protéines végétales.
(2) Pour preuve, le bio, jadis marginal, prend désormais une place de choix dans les linéaires.
(3) Oléagineux : colza, tournesol, olive, soja, lin ; protéagineux : légumes secs, pois, féverole, lupin, luzerne, lentille…
(4) Les triturateurs se chargent d’extraire l’huile végétale des graines ; les raffineurs gèrent l’ensemble des opérations qui servent à transformer l’huile brute en un produit de consommation ; les laboratoires transforment l’huile brute en ingrédients oléochimiques pour les cosmétiques, les encres, les produits d’hygiène et les solvants. D’autres entreprises encore fournissent l’alimentation animale en coproduisant du tourteau ou du fourrage. Après l’extraction de l’huile des graines, on peut utiliser les écailles, appelées tourteaux, pour nourrir le bétail (22 % de la nourriture) ; ces protéines végétales françaises pures peuvent se substituer aux protéines importées.
(5) Quatre organismes fondateurs de la marque devenus cinq : FOP (Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux), ONIDOL-UNIP, devenu Terres Univia (ex Organisation nationale interprofessionnelle des graines et fruits oléagineux et Union nationale interprofessionnelle des plantes riches en protéines), CETIOM, devenu Terres Inovia le 9 juin 2015, Institut technique des oléagineux, des protéagineux et du chanvre (ex Centre technique interprofessionnel des oléagineux métropolitains) et Sofiprotéol, société de financement et de développement de la filière des huiles et des protéines.
(6) Les marques garantissent que les graines qui entrent dans la composition des produits sont semées, cultivées, récoltées, stockées et transformées en France.
(7) En adoptant, par exemple, un mode de culture respectueux des sols et de l’environnement grâce à des choix de plantes nécessitant moins de traitements chimiques que d’autres et en permettant la rotation des terres avant la culture du blé ; les légumineuses (pois…) n’ont aucun besoin d’engrais azotés.
(8) Le biocarburant Diester, issu des graines de colza ou de tournesol, est incorporé à hauteur de 7 % dans le diesel et de 30 % dans le carburant des bus. 24 millions de véhicules roulent avec du Diester réduisant ainsi les émissions de gaz à effet de serre.
(9) Plus d’un million de tonnes de graines de colza y sont transformées chaque année. Saipol, numéro un de la trituration en France avec 3,9 millions de tonnes de graines triturées, dispose de sept usines en France.
Une marque interactive et transparenteEntretien avec Antoine Henrion, Agriculteur en Moselle et président du GIE Terres de Communication Pourquoi avoir créé une marque caution en 2014, quand la filière a 40 ans ?Antoine Henrion : Elle est en construction depuis 40 ans par les professionnels de la filière, aussi Terres OléoPro est-elle sa petite-fille. La marque est en cohérence avec l’esprit de la filière, qui l’irrigue et guide ses actions. Elle est révélatrice d’un maillage entre tous ses acteurs. En 2014, nous avons souhaité matérialiser le lien légitime que nous, agriculteurs, entretenons avec les consommateurs, les tenir informés de tout ce que nous avons fait et que nous continuons à faire. Depuis 40 ans, le contexte a, de fait, évolué. La société offre de nouvelles possibilités de communiquer auprès de ces consommateurs dont les attentes en termes d’information sont devenues plus qualitatives. Aussi la marque Terres OléoPro vient-elle valoriser nos engagements et nos actions auprès d’eux. La marque Terres OléoPro a-t-elle été créée par une agence ?A. H. : Oui, c’est l’agence Out of the box qui nous a accompagnés en interviewant tous les acteurs de la filière, les collaborateurs, pour bien faire surgir dans la marque nos origines et notre finalité : produire en filière sur des territoires. Nos enquêtes ont confirmé que les consommateurs sont soucieux de l’origine des produits qu’ils achètent. Nous nous sommes donc collectivement posé la question de savoir comment l’on pouvait traduire cette attente dans la marque et leur donner une réponse permanente. Terres rappelle le lien avec les territoires, OléoPro celui avec les oléagineux et les protéagineux. À quelle structure appartient-elle et qui l’anime ?A. H. : C’est une démarche collective de tous les acteurs de la filière, démarche interprofessionnelle. Cette marque a donc pour finalité d’être destinée à tous les acteurs qui adhèrent à la filière. D’où le rappel constant qu’elle est une marque filière, qui singularise une chaîne d’acteurs, qui apporte grâce à des garanties une qualité aux consommateurs. Le GIE Terres de Communication, que dirige Florence Doat- Matrot, porte la marque et l’anime. Le comité des présidents du GIE, que je préside et qui rassemble les entités de la filière 10, assure les prises de décision, élabore la stratégie et s’occupe de la gestion collégiale de la marque. Ce comité est également le jury qui agrée les candidatures de marques et d’entreprises à la marque Terres OléoPro. La parole est donnée aux agriculteurs, producteurs et c’est là que réside, en particulier, l’originalité de notre filière. Nous ne prenons pas de décision sans un avis éclairé de nos collaborateurs. Marque, marque filière, label, AOP… comment le consommateur peut-il faire la différence ?A. H. : Notre marque est interactive, ce qui la différencie d’autres labels, et dispose d’un cahier des charges qualitatif qui dialogue avec le consommateur. Notre ambition est de l’informer quand il achète un produit doté du logo Terres OléoPro. Il peut aller sur le site Internet, notamment pour connaître l’origine des modes de production et de fabrication, la collecte, la transformation et la mise sur le marché. Le consommateur a également accès à nos cinq engagements 11, qui attestent de la qualité de nos graines. La web-série Paroles de terres vient par les témoignages d’agriculteurs le rassurer et le conforter dans ses choix d’achat, lui offrant de mettre un visage sur les cultures. Par ailleurs, nous avons des projets de dialogue sur les réseaux sociaux avec les producteurs. On souhaite raconter aux consommateurs une histoire vraie, incarnée et non idyllique ou caricaturée. Notre communication est dirigée aussi bien « farmer to consumer » que « consumer to farmer ». Que peut attendre une marque agro-alimentaire de son adhésion à Terres OléoPro ? Les industriels de l’agro-alimentaire ne sont-ils pas de plus en plus conscients de l’importance de la filière pour rassurer les consommateurs ?A. H. : Nos cinq engagements fondent notre action et doivent susciter l’adhésion des marques non seulement alimentaires mais aussi non-alimentaires. Nos productions entrent dans la composition de dentifrices, de produits cosmétiques, etc.. Les agriculteurs s’engagent dans la durée, ce qui ne peut que rassurer les marques. En 2017, d’autres marques vont nous rejoindre. En effet, les industriels agro-alimentaires recherchent, de plus en plus, ce lien avec l’amont et les filières agricoles. Une cotisation est-elle liée à l’affichage de la marque sur le produit ?A. H. : Les marques signent un contrat et donnent une cotisation forfaitaire afin de financer l’administration du GIE, la gestion de la marque, sa promotion, son animation, sa visibilité. Certaines marques ont déjà leur filière (LU Harmony par exemple). Sont-elles éligibles à votre marque filière ? Qu’en est-il des marques de distributeurs (Carrefour et ses filières) ?A. H. : Toutes les marques sont éligibles si elles respectent notre cahier des charges. Le comité des présidents de chacune des entités de notre filière étudie et valide les dossiers des partenaires qui postulent. Le cahier des charges est-il voué à être enrichi (actuellement 21 engagements) ? Comment contrôler 200 000 acteurs ?A. H. : Pour le moment, les 21 engagements sont suffisants. Au-delà du nombre, il faut présenter une cohérence. Pour le contrôle, rappelons que la marque Terres OléoPro est basée sur l’inscription dans une démarche durable. Chaque acteur de la filière peut être contrôlé de façon aléatoire par l’organisme de certification, sachant qu’il existe déjà des cahiers des charges à tous les niveaux. Nos engagements actuels nous permettent d’avoir une filière française Terres OléoPro qui place ses exigences au-delà de la réglementation, c’est d’ailleurs le cas des deux tiers de nos engagements. Notre objectif étant de garder cette longueur d’avance et de continuer à toujours progresser, nous serons sans doute amenés à réviser notre cahier des charges, en lien avec les enjeux des filières françaises et de nos préoccupations vis-à-vis des consommateurs.
Terres OléoPro sera présent au Salon International de l’Agriculture 2017 du 25 février au 5 mars, à la Porte de Versailles, hall 2.2, partenaire de l’Odyssée végétale. Quelques chiffres
Terres OléoPro en chiffres
Notes
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