Entreprises responsables primées pour leur nudge
15/07/2018
L’AIM ¹ a récemment organisé le Nudging for Good Awards, dont l’objectif était de promouvoir l’utilisation du nudge for good parmi ses membres, pour favoriser des comportements responsables. Nudging for Good Awards, ou quand les marques incitent les consommateurs à adopter des comportements responsables.
par Etienne Bressoud,
Directeur de BVA Nudge Unit, vice-président de NudgeFrance
Les sondages nous apprennent que 61 % des personnes interviewées se déclarent très concernées par les enjeux environnementaux. Pourtant, l’agriculture biologique ne représente que 4,5 % de la surface agricole, 63 % des trajets pour se rendre au travail se font en voiture, et les placements financiers solidaires ne représentent que 0,16 % des placements ! La prise de conscience, l’information, ne suffisent pas à provoquer un changement de comportement, même pour un enjeu aussi important que celui de l’environnement, même si nous avons tous l’intention d’agir. Le nudge, littéralement « coup de pouce », également traduit par « incitation douce », peut y aider. Il consiste à créer des contextes de choix qui encouragent les individus, sans les contraindre, à passer de l’intention à l’action 2. Cette incitation douce les amène à prendre des décisions et à adopter des comportements bénéfiques pour eux-mêmes, la collectivité, ou la planète. Pour cela, le nudge s’appuie sur l’économie comportementale, courant de pensée scientifique dont un des pères fondateurs, Daniel Kahneman, a reçu le prix Nobel en 2002. Ce courant s’attache à la compréhension des facteurs qui sous-tendent nos décisions quotidiennes. Il nous apprend que nous ne sommes pas des Homo oeconomicus rationnels, « maximisateurs d’utilité », mais des êtres humains empreints d’émotions et d’habitudes, influencés par leur environnement physique et social. Bref, que nous sommes plus proches d’Homer Simpson que de Superman ! Par exemple, nous sommes fortement influencés par notre entourage, les normes sociales guident en partie nos décisions. À tel point que si vous souhaitez inciter les usagers à éteindre leur climatisation, il est plus efficace de leur signaler que « 77 % de vos voisins ont déclaré qu’ils éteignaient leur climatiseur et utilisaient leur ventilateur, SVP faites comme eux ! » que de leur expliquer qu’en éteignant leur climatisation, ils peuvent économiser 50 dollars par mois. Ce message, qui active l’influence de la norme sociale, est un nudge testé avec succès aux États-Unis.
Du nudge au nudge for good
Le nudge a d’abord été utilisé dans le cadre des politiques publiques pour modifier les comportements en matière de santé publique, de nutrition, d’épargne, d’éducation, d’impôts, de sécurité routière ou encore d’éco-gestes et de développement durable. Les gouvernements ont une réelle légitimité à encourager les citoyens à adopter des comportements vertueux, même s’il se trouvera toujours quelqu’un pour leur reprocher un certain paternalisme. Mais le nudge n’est pas réservé aux politiques publiques. Qui mieux que les marques, en contact quotidien avec les consommateurs, peut porter des messages et agir sur les comportements ? Les pouvoirs publics ont peu d’occasions d’interagir avec les consommateurs. Les marques en ont tous les jours. Elles sont ainsi dans une position privilégiée. Combien de produits de marque avez-vous dans votre cuisine, dans votre salle de bain ? Autant de points de contact susceptibles de vous aider à adopter le bon comportement au bon moment. C’est ainsi que pour sa campagne « Turn to 30 », Ariel a mis en oeuvre un nudge indiquant de laver à 30 °C directement sur le pack, agissant au bon moment, celui où le consommateur met la poudre dans sa machine à laver et en règle la température de lavage. Résultat : le pourcentage de consommateurs lavant à 30 °C est passé de 2 % en 2002 à 17 % en 2007.
Depuis des décennies, des acteurs privés tels que les marques cherchent à encourager des comportements responsables, en complément des actions menées par les pouvoirs publics. Recyclage, hygiène, nutrition, santé… sont autant de sujets pour lesquels les marques ont développé des actions au travers de leurs politiques RSE. Certaines sont des programmes éducatifs, d’autres passent par des plans de communication. Et le succès de ces actions est indéniable si l’on écarte les quelques tentatives de « green-washing ». Cependant, l’efficacité des politiques RSE est souvent mesurée par des KPI tels que le nombre de reach de la campagne et des éléments qui la composent, ou encore par les indicateurs d’agrément, de recall... qui laissent plus rarement la place à des indicateurs comportementaux. C’est dans cette logique comportementale que réside l’apport du nudge à la politique RSE des marques. Au-delà d’exposer les consommateurs à des campagnes éducatives et à une communication destinée à les persuader de la nécessité de changer, le nudge propose de modifier leur environnement pour les inciter à adopter des comportements responsables, avec lesquels ils sont, le plus souvent, en phase.
Du nudge for good aux Nudging for Good Awards
AIM, association qui regroupe plus de 1 800 marques, a bien cerné la position privilégiée de ces dernières et l’intérêt que représente le nudge. C’est pour cela qu’elle a mis à leur disposition, ouvert à tous, la toolkit « Nudging for good » (nudgingforgood.com), réalisée avec l’aide de la BVA Nudge Unit. L’objectif : accompagner les marques pour qu’elles facilitent l’adoption de comportements responsables par leurs consommateurs. Cette boîte à outils détaille toutes les étapes de conception et de mise en place d’un nudge 3. Pour aller plus loin et inciter les marques à passer de l’intention à l’action, l’AIM a organisé le « Nudging for Good Awards ». L’objectif en est de promouvoir l’utilisation du nudge for good parmi ses membres, au travers des thèmes suivants :
- nutrition et style de vie équilibré ;
- consommation d’alcool responsable ;
- réduction des déchets ;
- économie d’eau et d’énergie ;
- consommation saine et adaptée ;
- soin et santé. En janvier 2017, 22 marques différentes ont candidaté au Nudging for Good Awards, présentant 44 nudges, dans deux catégories différentes. 14 finalistes ont été retenus et auditionnés par un jury prestigieux.
Quand les marques appliquent le nudge for good avec succès
Le jury, présidé par Robert Madelin, ancien directeur général de la Commission européenne, conseiller du Forum économique mondial sur l’avenir des sciences comportementales, a décerné six prix :
- un Diamond Award, plus haute distinction ;
- quatre Excellence Awards répartis en deux catégories : santé & bien-être et développement durable ;
- un coup de coeur du jury.
Diamond Award :
Attribué à My UV Patch de La Roche-Posay (Cf. entretien page 23).
Excellence Awards, catégorie santé & bien-être :
Attribué à Caprice des Dieux ( Cf. entretien page 25) et à Heineken (Cf. entretien page 26).
Excellence Awards, catégorie développement durable :
Deux prix ont été décernés. L’un à Wrigley et l’autre à Dove & Andrélon (Unilever).
Inciter les gens à jeter leurs déchets dans les poubelles publiques plutôt que par terre, c’est la mission que s’est fixée Wrigley avec son nudge intitulé « Bin it for Good ».
Le nudge : des poubelles supportant des affiches aux couleurs d’oeuvres de charité locales, renouvelées chaque mois. L’affiche augmente la visibilité des poubelles, et indique que plus ces dernières seront remplies, plus l’oeuvre de charité mise en avant recevra d’argent.
Résultat : 42 % de déchets en moins dans les rues les mois où le nudge est déployé. Un pourcentage jugé impressionnant par le jury.
En moyenne, les Néerlandais passent neuf minutes par jour sous la douche. S’ils n’en passaient que quatre, ils économiseraient l’équivalent de 763 000 voitures sur les routes. Le meilleur moment pour faire passer le message : sous la douche, évidemment !
Le nudge : un message, inscrit sur un flacon de shampooing Andrélon ou de gel douche Dove, indique le temps conseillé sous la douche. Pour plus d’impact, les enfants ont la possibilité de personnaliser leur bouteille pour faire passer le message à toute la famille.
Résultat : la majorité des familles ayant eu une bouteille personnalisée par un de ses enfants a déclaré avoir réduit le temps passé sous la douche. Un programme éducatif qui a su utiliser le nudge pour augmenter son efficacité.
Le coup de coeur du jury :
Le jury a par ailleurs décidé d’attribuer un coup de coeur à SCA OkayCompressé, qui encourage les consommateurs à adopter un produit bon pour l’environnement : un essuie-tout réduit de moitié pour une même capacité d’absorption. La taille d’un pack est souvent un marqueur de quantité – le plus grand étant le mieux, bigger is better –, comment dépasser cette perception qui guide l’achat dans le cadre de la réduction de la taille d’un produit qui conserve la même efficacité ?
Le nudge : réduire l’aversion à la perte liée à la réduction de taille par la preuve, et transformer l’inconvénient (taille réduite = efficacité réduite) en avantage (taille réduite = stockage facilité).
Résultat : Une réduction des émissions de CO2, grâce à une diminution de 30 % des emballages et de 36 % des camions de transport. Un coup de coeur pour ouvrir le débat sur la place des réductions de packs dans l’approche nudge, d’autant plus légitime que la réduction de pack apporte un avantage au consommateur et ne se contente pas d’un argument écologique.
Quelques enseignements à retenir de ce Nudging for Good Awards
Les dossiers primés sont ceux dont les nudges reposent, conformément à la définition, sur les leviers de l’économie comportementale. En cela, le nudge est un peu plus que du marketing. La maîtrise des sciences de la décision est le meilleur garant de la créativité dans la conception des nudges : la compréhension des consommateurs et l’impact sur leurs comportements individuels sont clés. Parce que les individus ne font pas toujours ce qu’ils disent, le jury a été particulièrement sensible aux mesures de l’efficacité des nudges qui ont démontré des changements de comportement, au-delà des changements d’attitude et d’opinion. Ce Nudging for Good Awards a été l’occasion de percevoir la diversité des sujets susceptibles de faire l’objet d’une approche nudge en complément des politiques RSE.
Autre grand enseignement : les marques ont réellement une position privilégiée pour agir sur les comportements durables des consommateurs. Elles peuvent, grâce à cette nouvelle approche complémentaire, créer une relation gagnant-gagnant-gagnant, pour les consommateurs, elles-mêmes et la planète. Les prix ont été remis à l’occasion d’un dîner de gala, le mardi 20 mars, à Bruxelles, en présence des membres du jury et des finalistes. Face à ce succès, nul doute que ces Nudging for Good Awards ne sont qu’une première édition : l’AIM s’apprête à renouveler l’expérience.
Notes
(1) European Brands Association.
(2) Cf. La Revue des marques n° 92, octobre 2015.
(3) Cf. La Revue des Marques n° 93, janvier 2016.
Les critères du Nudge Awards
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Diamond Award pour La Roche-Posay
Entretien avec Gene Colón,
Directeur international de la communication et des relations médias, La Roche-Posay laboratoire dermatologique
Propos recueillis par Jean Watin-Augouard
Est-ce avec cette distinction que vous avez pris connaissance du concept du nudge ou y aviez-vous été sensibilisé auparavant ?
Gene Colón : Nous avons pris connaissance de ce concept il y a un an, en 2016, quand le Nudge Awards a été lancé. C’est le département Communication global de L’Oréal, en contact avec l’AIM, qui nous a tenus informé de l’existence d’un tel prix.
Comment avez-vous conduit le projet en interne ? et comment s’est fait le choix du nudge, le capteur My UV Patch ?
G. C. : C’est l’équipe en charge du développement durable et des actions sociétales au niveau du groupe qui a conduit le projet en interne en demandant aux marques de L’Oréal de soumettre des propositions. Cette année, La Roche-Posay a présenté deux projets : My UV Patch, mais aussi SkinChecker, destiné à sensibiliser les gens au dépistage du cancer de la peau. Le concept développé devait respecter huit critères (Cf. encadré page précédente), entre autres être accessible, pratique, écologique, répondre à un insight consommateur, etc.
Quel est son principe ? et dans combien de pays est-il appliqué ?
G. C. : My UV Patch se présente sous la forme d’un capteur cutané doté de petits carrés colorés, dont l’encre photosensible change de couleur en fonction de la dose de rayons UV qu’elle reçoit. Le patch est associé à une application personnalisable avec ses données individuelles : photosensibilité, type de peau, couleur des yeux, etc. Associant ces données à la géolocalisation, qui permet de déterminer un index UV, et à l’observation des encres, un algorithme fait émerger des conseils pour améliorer le comportement de la personne porteuse du patch et exposée au soleil, lui signalant par exemple le moment d’appliquer de la crème solaire. En 2016, nous avons proposé ce capteur dans 14 pays – 400 000 patchs – et cette année nous allons couvrir 36 pays – presque un million de patchs. Le patch n’est pas commercialisé, mais disponible gratuitement. Et parfois, dans certains pays, offert lors de l’achat d’une crème solaire.
Comment avez-vous communiqué auprès des consommateurs ?
G. C. : Selon les pays, le patch sera distribué gratuitement par le biais de nos prescripteurs, à travers trois canaux principaux : les médecins les plus concernés (dermatologues et pédiatres), les pharmaciens et les journalistes. Nous engageons nos prescripteurs pour communiquer auprès d’eux et leur expliquer l’intérêt du patch. Dans plusieurs pays, il est distribué directement en ligne, via le CRM, pour mieux assurer le téléchargement de l’application.
L’impact sur le comportement des consommateurs et son changement vous satisfait-il ? varie-t-il selon les pays ?
G. C. : Grâce à l’utilisation du patch pendant les vacances, 37 % des personnes l’ayant porté ont utilisé plus de crème solaire, 31% sont restés davantage à l’ombre et 63 % ont eu moins de coups de soleil. Nous sommes très satisfaits des résultats, mais n’avons pas encore toutes les données permettant de constater leur variabilité selon les pays. Il faut savoir que globalement (selon une étude Ipsos), seulement 22 % des gens mettent de la crème solaire ! même si presque 90 % d’entre eux connaissent les risques.
La Roche-Posay bénéficie-t-elle désormais, en interne, d’une équipe dédiée à la détection de futurs nudges ?
G. C. : Nous travaillons avec les départements de recherche et les incubateurs de L’Oréal (qui détectent les start-up) à la découverte d’autres nudges. Par exemple, on pourrait imaginer d’autres technologies de patch pour mesurer certaines caractéristiques de la peau…
Comptez-vous recourir au nudge dans le management interne pour changer le comportement des salariés ?
G. C. : Oui, en particulier pour encourager les salariés à recourir au dépistage. Nous avons aussi récemment organisé une semaine « verte » pour les inciter à ne pas imprimer de papier, à contrôler leur consommation d’électricité, etc.
Excellence Award Caprice des Dieux
Entretien avec Nicolas Gruener,
Directeur du marketing Europe de l’Ouest et du Sud Savencia Fromage & Dairy
Propos recueillis par Jean Watin-Augouard
Est-ce avec cette distinction que vous avez pris connaissance du concept du nudge ou y aviez-vous été sensibilisé auparavant ?
Nicolas Gruener : Nous sommes sensibles à l’intérêt du nudge depuis un certain temps maintenant, parce que nos réflexions en matière de nutrition nous y ont amené naturellement. Le fromage est pour beaucoup de consommateurs, et pour les Français en particulier, un produit plaisir avant tout, bénéficiant d’un important attachement culturel. Son image est excellente en termes de nutrition – c’est même une des sources essentielles de calcium chez l’enfant comme chez l’adulte – et il apporte également des matières grasses en quantité raisonnable. Nous sommes une entreprise responsable, qui compte parmi les leaders du fromage, et à ce titre nous pensons que nous devons contribuer à en promouvoir une consommation intelligente, raisonnée, équilibrée, pour qu’elle reste toujours un plaisir. Une des approches les plus efficaces en la matière se révèle être le nudge, nous en sommes convaincus.
Comment avez-vous conduit le projet en interne ? et comment s’est fait le choix du nudge, les portions en forme de bûche ?
N. G. : Nous travaillons en étroite collaboration avec la direction nutrition du groupe sur ce sujet. Concernant la nutrition, nous pensons que l’essentiel réside dans une alimentation variée et équilibrée, et pour cela nous souhaitons favoriser les bons comportements. Deux démarches ressortissant du nudge nous ont parues pertinentes. D’abord proposer, sans même parler explicitement de nutrition, des associations avec d’autres aliments permettant un repas, même rapide, équilibré. Un exemple simple : en invitant à déguster un fromage (et toute sa richesse en calcium et vitamines…), on n’oublie pas la salade qui l’accompagne, c’est aussi simple que ça ! C’est entre autres ce que nous proposons sur notre site référent quiveutdufromage.com, assorti de 1 000 autres suggestions bien plus créatives ! Dans le même souci d’une alimentation équilibrée, il nous a paru important de sensibiliser les consommateurs à la notion de portion. Nous avons trouvé dans la buche, forme originale pour un fromage, un caractère pratique à trancher. Quant à l’emballage qui protège le fromage, il matérialise et suggère, grâce à la présence de languettes prédécoupées, dix portions de 15 grammes.
Comment avez-vous communiqué auprès des consommateurs sans les culpabiliser ? Ce nudge concerne-t-il davantage les adultes ?
N. G. : L’avantage d’En Cas de Caprice, et c’est ce qui en fait un excellent nudge, c’est que sa présentation induit spontanément cet usage de petites portions, sans même avoir à communiquer davantage. On a simplement mis en valeur à la fois ce repère visuel de la languette sur le pack et la gestuelle en publicité.
L’impact sur le comportement des consommateurs et son changement vous satisfait-il ? comment l’avez-vous mesuré ?
N. G. : Nous l’avons mesuré en situation, dans la « vraie vie », interrogeant les consommateurs sur leur perception et leur consommation moyenne de fromage par rapport à un fromage « standard ». Ils ont clairement davantage conscience de la quantité consommée et nous avons pu constater que la portion moyenne par occasion était légèrement réduite. Mais mieux que ça ! La prise de conscience par les consommateurs de la portion qu’ils consomment avec En Cas de Caprice fait qu’ils sont plus sensibles ensuite à la quantité de fromage à consommer en général !
Une équipe est-elle dorénavant dédiée à la détection de futurs nudges pour d’autres produits du groupe ?
N. G. : Nous avons une politique nutritionnelle claire et ambitieuse au sein du groupe, avec une équipe dédiée, le nudge est une approche dont nous étions déjà convaincus, mais assurément ce premier succès nous encourage à continuer. Et au-delà c’est surtout une excellente façon de faire prendre conscience à toutes les équipes en interne de l’intérêt de cette démarche pour qu’elle se diffuse à tous les niveaux.
Excellence Award Heineken
Entretien avec Mark van Iterson,
Director global Heineken Design Global Commerce
Propos recueillis par Jean Watin-Augouard
Est-ce avec cette distinction que vous avez pris connaissance du concept du Nudge ou y aviez-vous été sensibilisé auparavant ?
Mark van Iterson : J’avais une bonne connaissance de ce concept du fait de ma formation universitaire de designer produit : comprendre et influencer l’interaction entre un produit et son utilisateur, et ce afin de créer une meilleure expérience avec le produit, plus intuitive, ou encore de résoudre un problème. Cependant, je ne connaissais pas les Nudge Awards.
Depuis quand sensibilisez-vous les consommateurs à la consommation responsable ? En quoi le nudge que vous avez conçu se différencie-t-il de vos actions antérieures ?
M. V I : Avec la marque Heineken, nous travaillons depuis plus de 10 ans sur la consommation responsable. Jusque-là, nous avions privilégié la communication grand public pour induire un comportement responsable des consommateurs. Par cette expérience nudge, nous souhaitons agir plus concrètement : avec l’opération « This one is on us », nous offrons, in situ et au moment de la consommation, une solution pour modérer cette dernière.
Comment cette opération a-t-elle été conçue en interne ?
M. V I : De façon très constructive ! Tout le monde chez Heineken comprend que la consommation responsable est essentielle et nous voulons sincèrement la promouvoir. Nous ne savions pas si cela fonctionnerait, mais ce que nous savions, c’est qu’il nous fallait travailler à des solutions, essayer, apprendre, et faire des progrès…
Dans quels pays l’opération est-elle activée ?
M. V I : L’opération, qui consiste à proposer un verre lors de l’achat d’une bière Heineken afin de se servir en complément de l’eau à une colonne dédiée, a été initiée en Grèce, au Brésil et aux Pays-Bas. Nous commençons juste à déployer le système, et d’autres pays devraient suivre.Nous avons également d’autres solutions en place dans de nombreux pays pour mettre gratuitement de l’eau à disposition des consommateurs lors d’événements et sur des festivals auxquels nous participons.
Comment avez-vous communiqué auprès des consommateurs sans les culpabiliser ?
M. V I : Nous optons pour une approche positive. Il n’y a pas de problème à consommer de la bière tant que vous le faites de manière responsable, et l’eau est pour cela l’un des vecteurs de solution possibles. Le consommateur adopte ainsi une consommation responsable d’alcool très facilement.
L’impact sur le comportement des consommateurs et son changement vous satisfait-il ? varie-t-il selon les pays ?
M. V I : Les premiers résultats sont satisfaisants, cependant, il y a encore beaucoup de travail à faire. Dans l’idéal, il faudrait avoir toujours à disposition de l’eau fraîche, propre et gratuite sur les lieux de consommation de bière – et d’alcool en général. C’est un objectif à long terme. Si dans certains pays il est culturellement habituel de servir de l’eau fraîche gratuitement avec chaque boisson alcoolisée, dans d’autres ce n’est absolument pas le cas. D’autre part, offrir de l’eau n’est pas la seule solution. Il faut développer d’autres possibilités. Nous n’en resterons donc pas là sur le sujet…
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