Nestlé Céréales, nouvelle valeur ajoutée par le bio
21/08/2023
Conséquence de l’inflation, la part des produits issus de l’agriculture biologique dans l’alimentation des Français est passée de 6,4 à 6 % en 2022. La baisse se poursuit-elle en 2023 et quels produits ou filières (œufs, lait, porc, fruits et légumes, céréales) touche-t-elle surtout ?
Pauline Ancian : La baisse de la consommation de produits bio touche l’ensemble des filières. Après des années de croissance exceptionnelle et de démocratisation du bio – de 50 % de foyers acheteurs en 2000 à 98 % en 2022 –, nous observons un recul des ventes en 2022. Nielsen l’estime en valeur à 3,1 %. En cumul annuel à date P4 2023, la décroissance ralentit, à moins 1,4 %. Le dernier rapport de l’Agence bio (juin 2023) montre une baisse moyenne de 3 à 13 % selon les produits par rapport à 2021, exception faite des boissons alcoolisées et du vin (respectivement 0 % et + 2 %). Dans ce contexte, où joue également l’inflation, les céréales restent l’une des catégories du petit-déjeuner les plus accessibles, avec une moyenne de 5,49 €/kg (indice 72 vs pâtisserie traditionnelle, indice 90 vs biscuits petit-déjeuner, mesurés à la P12 2022). Les céréales de petit-déjeuner sont une catégorie très développée en bio : 20 % des ventes du rayon, alors que le bio ne représente que 5 % des ventes du total PGC FLS.
Observez-vous l’effet de la contrainte budgétaire dans les ventes de votre gamme de céréales de petit-déjeuner bio, lancée en 2018 ? Le reflux du bio vous paraît-il conjoncturel, dû uniquement aux prix, ou plus profond ?
P. A. : Depuis le milieu de l’année 2022, nous ressentons des baisses dans nos ventes de céréales bio. En cumul annuel à date pour la P5 2023, les ventes progressent de 3,9 %, alors que les céréales non bio progressent de 12 %. Notre diagnostic est double : l’inflation affecte le pouvoir d’achat des foyers, qui font des arbitrages ; la multiplication de labels concurrents a contribué à apporter de la confusion.
Le bio fait partie des labels les plus connus (98 % de notoriété), il est consommé au moins une fois dans l’année par la quasi-totalité des Français (98 % des foyers acheteurs). Néanmoins, seulement 62 % des Français disent qu’ils savent réellement ce que cela veut dire et seulement 48 % que c’est meilleur pour l’environnement, 40 % qu’il est clair et compréhensible, 35 % meilleur pour la santé, et 31 % qu’il leur inspire totalement confiance.
Face à la multiplication des labels, il est important de sensibiliser les consommateurs au cahier des charges de l’agriculture biologique. Toute la filière a un rôle à jouer dans le réenchantement du bio. C’est pourquoi depuis la fin de 2022 nous avons en rayon de nouveaux conditionnements qui réexpliquent les grands principes de l’agriculture biologique. Le bio représente environ 7 % de nos ventes de céréales de petit-déjeuner, et nous atteignons 7 % de part de marché dans le total céréales bio, avec un million de foyers acheteurs. Un bol de céréales Nestlé reste accessible et de qualité : des céréales produites en France, avec du blé complet local, plus durable, rémunéré au-dessus des cours du marché et affichant un Nutri-Score A.
Prix plancher et plafond pour le blé bio
Les attentes des consommateurs ont-elles évolué vers plus ou moins d’exigence à l’égard du bio en matière sanitaire ou environnementale ? Y aurait-il des motifs nouveaux et spécifiques de défiance ?
P. A. : D’après une étude réalisée en partenariat avec l’Ifop début 2022, le premier engagement attendu de la part des marques est de garantir des produits sains, devant la préservation de l’environnement et le soutien à l’économie locale. Nous sommes engagés, avec la coopérative agricole Oxyane, à défendre l’agriculture biologique et à faire redécouvrir ses bienfaits avec plusieurs leviers, notamment avec des initiatives comme #RéveilBio, qui invitait en juin dernier des consommateurs à découvrir l’exploitation d’un de nos agriculteurs partenaires dans la production de céréales bio, ou comme notre partenariat avec la plateforme de financement participatif MiiMOSA depuis 2019, en soutien de projets de transition vers des agricultures biologiques ou régénératrices. Des consommateurs ont pu faire la rencontre d’Alexandre Merle, l’un de nos agriculteurs partenaires, découvrir son exploitation à Serrières-en-Chautagne (Savoie), et mieux comprendre les enjeux et les opportunités liés à ce type d’agriculture. Il est également important de rappeler qu’un produit bio est contrôlé à chaque étape de la chaîne, du grain au bol, par des audits d’organismes certificateurs. Le très bon accueil qu’a reçu cette opération nous porte à imaginer de renouveler l’expérience dans les prochaines années, il est trop tôt pour en dire plus. Nous savons que nos efforts de transparence servent l’image de la catégorie tout entière et renforce l’attachement des consommateurs à nos marques.
En quoi consiste cette association avec Oxyane ? d’autres coopératives vous accompagnent-elles ?
P. A. : Depuis 2021, nous travaillons avec la coopérative Oxyane, particulièrement implantée dans la région Auvergne-Rhône-Alpes où se situe notre usine. Nous avons la volonté d’un partenariat de long terme, qui donne de la visibilité à nos volumes et sécurise les débouchés des agriculteurs d’Oxyane. Le prix du blé bio étant déterminé par le marché, il peut connaître des variations importantes à la hausse comme à la baisse. C’est pourquoi, pour donner davantage de visibilité aux agriculteurs, nous nous accordons avec Oxyane sur un prix d’achat plancher et un prix d’achat plafond. Ce système de fixation des prix donnede la visibilité et exercer un effet d’amortisseur en cas de variations importantes des cours. Depuis 2020, nous soutenons financièrement six agriculteurs, dont Alexandre, dans leur transition vers l’agriculture biologique, en partenariat avec la plateforme de financement participatif MiiMOSA.
Quelle proportion d’agriculteurs bio Nestlé compte-t-il en France parmi ses fournisseurs ?
P. A. : Nous ne travaillons pas en direct avec les agriculteurs, mais avec des coopératives. En France, les agriculteurs céréaliers sont regroupés en coopératives ou travaillent avec des négoces. Il y a une relation privilégiée avec les coopératives, qui au-delà de la commercialisation de la production des agriculteurs assurent leur accompagnement technique dans la mise en place des pratiques biologiques. C’est le moyen le plus naturel de collaborer avec les agriculteurs ; ce qui ne nous empêche pas de les rencontrer et d’échanger avec eux régulièrement.
Complémentarité du bio et régénératif
Le bio doit-il être synonyme d’agriculture régénératrice ?
P. A. : Réglementée depuis 1991 dans l’Union européenne, l’agriculture biologique promeut des pratiques de culture et d’élevage soucieuses du respect des équilibres naturels. Elle exclut l’usage des produits chimiques de synthèse pour préserver la qualité des sols, la biodiversité, la qualité de l’air et de l’eau. Ces pratiques exigeantes, qui consistent à trouver des alternatives naturelles, nécessitent trois années de conversion pour l’agriculteur et conduisent bien souvent à une baisse des rendements. D’où la nécessité d’une meilleure valorisation de la production.
L’agriculture régénératrice regroupe un ensemble de pratiques agricoles qui visent à préserver la biodiversité, à limiter l’érosion et à développer la fertilité naturelle des sols, leur permettant d’agir comme un puit de carbone captant le CO2 de l’atmosphère. Les principales pratiques de l’agriculture régénératrice consistent à : cultiver une grande diversité de cultures sur l’exploitation pour contribuer à des sols vivants et riches en nutriments, essentiels pour les plantes ; couvrir le sol au maximum (avec des cultures ou des couverts végétaux) afin de réduire son érosion et de l’aider à capter le carbone ; limiter le travail du sol, comme le labour, tout en cherchant à maintenir le niveau de production pour l’agriculteur.
Ces deux approches de l’agriculture sont complémentaires. En tant qu’industriel, notre rôle est de développer la filière bio, mais également de contribuer à améliorer les conditions de culture du blé, conventionnel, biologique et agriculture régénératrice. C’est ce que nous faisons avec notre démarche Préférence, lancée en 2016, ou par le biais d’opérations comme #RéveilBio et notre partenariat avec MiiMOSA.
Et en matière sociale, les attentes des consommateurs ont-elles évolué ? La proximité d’origine (locavorisme) tend-elle à surdéterminer le choix d’un produit bio ?
P. A. : Si le bio reste un vecteur naturel de locavorisme, avec des parts de produits bio français en croissance (les importations de produits bio sont passées de 32 % en 2021 à 30 % en 2022), nous sommes convaincus de la nécessité de produits bio répondant à deux attentes des consommateurs : le profil nutritionnel des aliments et la possibilité de consommer local. Nos céréales bio sont fabriquées en France, dans notre usine de Rumilly en Haute-Savoie. Nous travaillons notamment avec un meunier installé à 30 kilomètres de l’usine, et avons pour objectif de couvrir 100 % de nos besoins en blé bio français en 2025, cultivé au plus près de notre usine avec des agriculteurs de la région. En 2021, nous étions à 15 % . En 2022 à 30 % nous augmenterons progressivement.
Notre ancrage est local, avec quatre sites en France (un siège social, deux usines et un centre de distribution). Nous travaillons avec 871 fournisseurs en France, soit 83 % des fournisseurs Nestlé Céréales, employons 673 personnes (équivalent temps plein) et soutenons 1 278 emplois supplémentaires en France (équivalent temps plein)¹.