Alimentation durable : réflexions et pistes d’action
16/01/2025
Si la réduction de l’empreinte environnementale de notre alimentation reste une priorité, la prise en compte de la santé dans l’assiette est de nouveau au cœur des attentes des Français. Seule une approche combinant environnement et nutrition permettra aux marques agroalimentaires et aux entreprises de la restauration collective de bien répondre aux attentes de leurs clients et consommateurs, tout en contribuant efficacement à la transition alimentaire.
Un système alimentaire sous pression
Notre modèle alimentaire fait face à des tensions sans précédent. Source d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale [1], très consommatrice d’eau et première cause de déforestation dans le monde, la production alimentaire est aussi l’une des premières victimes de la crise environnementale. Or elle doit permettre de nourrir une population mondiale de dix milliards d’êtres humains en 2050 [2]. Alors que six des neuf « limites planétaires » sont dépassées, il s’agit de réinventer nos modèles pour produire plus mais surtout mieux.
Mieux, car il s’agit de répondre à des problématiques de santé publique alarmantes. En 2022, 43 % des adultes de dix-huit ans et plus étaient en surpoids et 16 % étaient obèses [3]. Et la précarité alimentaire s’aggrave, avec 37 % des Français se déclarant en insécurité alimentaire, trois fois plus qu’en 2015 [4]. À quoi il faut ajouter les besoins nutritionnels spécifiques d’une population vieillissante : en 2024, les plus de soixante-cinq ans étaient plus nombreux que les moins de quinze ans [5].
Face à ces défis, une approche s’impose, celle du One Health. Ce concept défini dans les années 2000 et objet d’un mémorandum signé par l’OMS, l’OMSA, la FAO et le PNUE [6] en 2022, met l’accent sur l’interdépendance entre la santé humaine, la santé animale et celle de l’environnement. Elle appelle à repenser nos modèles pour tendre vers une alimentation durable telle que définie par la FAO [7], c’est-à-dire qui contribue à protéger et à respecter la biodiversité et les écosystèmes, nutritionnellement sûr et saine, économiquement équitable, accessible et abordable, et culturellement acceptable.
Depuis la pandémie de Covid-19, les préoccupations liées à la santé sont en constante augmentation en France. C’est le premier sujet de préoccupation des Français, bien avant l’inflation ou les retraites selon l’étude Trendshaker menée par C-Ways, en octobre 2024. Cette préoccupation affecte directement leurs choix alimentaires : 85 % des Français privilégient les critères « naturels », « peu transformés » et « exempts d’additifs » [8]. Ils font d’ailleurs partie des citoyens européens les plus méfiants vis-à-vis de l’industrie agroalimentaire, 63 % d’entre eux estimant que les produits alimentaires sont « remplis de substances nocives » [9]. Cette attention portée à la santé se retrouve sur les réseaux sociaux : en 2021, la tendance #Healthy représentait 174 millions de posts sur Instagram, attirant particulièrement les 18-24 ans en quête de modèle nutritionnel [10].
Mais tout cela ne doit pas faire oublier un fait essentiel : le plaisir reste central dans l’acte alimentaire : pour les Français, bien manger rime avant tout avec convivialité et saveurs [11].
Des leviers pour les marques et les entreprises
Face à ces attentes, la réponse des entreprises du secteur alimentaire ne peut être que globale, environnementale et nutritionnelle, cohérente dans toute leur chaîne de valeur, et transparente : une transparence d’autant plus cruciale que se dessine l’étiquetage environnemental, qui complétera l’information nutritionnelle du Nutri-Score.
L’alimentation durable, prise dans sa globalité, offre aux entreprises agroalimentaires une opportunité de devenir actrices du changement, répondant aux attentes sociétales et aux impératifs environnementaux, tout en renforçant leurs liens avec les consommateurs. Celles qui réussiront cette transition auront conjugué innovation produit, engagement RSE et communication efficace.
S’engager dans une stratégie d’alimentation durable passe par trois étapes :
Se raconter : les consommateurs attendent davantage de clarté sur les conditions de production et de fabrication des produits. S’engager en faveur de l’agroécologie, c’est contribuer à la santé des écosystèmes et donc à la santé globale. Ce lien doit être fait pour permettre aux consommateurs de comprendre les effets de leurs choix, du champ à l’assiette. Cela vaut aussi pour les procédés de fabrication, qu’il faut expliquer pour contrer la défiance croissante envers les produits transformés.
Évaluer l’offre sous l’angle One Health : mener une analyse croisant l’empreinte environnementale et le profil nutritionnel des produits est d’autant plus éclairant qu’on le fait sur des produits intégrés à leur contexte de consommation réelle : juste portion, en recette ou plat combiné. Une analyse globale qui apporte un éclairage nouveau sur le rôle de d’une offre dans la transition alimentaire, et qui peut constituer une aide à la décision stratégique en termes de R&D et de RSE.
Accompagner le consommateur : développer un discours et des outils pédagogiques, proposer des repères concrets et décrypter les notations pour faciliter l’adoption d’une alimentation équilibrée et décarbonée au quotidien.
L’alimentation durable n’est pas seulement un impératif écologique ; elle redéfinit les codes du marketing alimentaire en plaçant santé publique et responsabilité environnementale au cœur des stratégies d’entreprise. Une transformation ambitieuse mais indispensable pour répondre aux défis du XXIe siècle.