La RSE, levier d’adhésion - Numéro 449
01/05/2015
Faut-il le rappeler, la RSE est d’abord une obligation légale, qui s’applique aux grandes entreprises et aux entreprises cotées. L’engagement pour la prise en compte de l’impact de l’activité vient d’ailleurs tout juste d’être renforcé – loi adoptée à l’Assemblée le 30 mars –, avec l’obligation pour les très grandes entreprises françaises de prévenir les atteintes aux droits de l’homme et à l’environnement de leurs sous-traitants étrangers. Après avoir été le parent pauvre des stratégies de communication, reléguée à des rapports annuels lus par des spécialistes, la RSE est aujourd’hui au cœur des prises de parole institutionnelles des acteurs économiques. Elle est devenue un enjeu de réputation, et les entreprises rivalisent pour valoriser leur engagement environnemental, social et sociétal. Mais au-delà de l’impact sur l’image de l’entreprise – aujourd’hui établi par les enquêtes d’opinion –, c’est à un changement de paradigme que l’on assiste : l’engagement pour une société plus durable devient peu à peu consubstantiel à la stratégie marketing des marques – produits ou services.
À l’instar du « Baromètre du bien-être durable » que nous avons développé depuis deux ans avec Ipsos, toutes les études montrent que les consommateurs ne se satisfont plus du « contrat de base », c’est-à-dire du bon rapport qualité-service-prix. Ils attendent plus des marques : plus d’éthique, plus de transparence, plus d’explications et globalement plus d’humanité. La différentiation par rapport aux offres concurrentes se nourrit de l’attitude de la marque et de l’entreprise qui la promeut. Plus la marque est incarnée et dévoile ses bonnes pratiques, son savoir-faire et ses valeurs, plus elle accroît la confiance que ses clients lui portent, puissant vecteur de leur fidélité et stimulant de leur envie de la recommander.
Autrement dit, ce sont aujourd’hui des impératifs pour les responsables marketing, tant la prise de pouvoir sur la marque par les consommateurs est devenue réalité – au travers notamment des conversations sur Internet. Certains objecteront que la mobilisation des marques pour diminuer leur impact sur l’environnement n’est pas déterminante en soi pour convaincre les consommateurs de payer plus. Mais peut-être faut-il regarder les choses sous un angle différent : les consommateurs ont bien des attentes en termes de RSE, mais elles se traduisent à l’échelle de leur écosystème, en commençant par eux et leurs proches. C’est pour cette raison que l’impact du produit sur la santé est perçu comme déterminant. Nous vivons dans une société de défiance, dans laquelle les individus ont besoin d’être rassurés pour eux-mêmes, avant de faire des choix de consommation privilégiant les marques qu’ils considèrent comme engagées pour la sauvegarde de la nature – celle qui leur est proche – ou en faveur de leur ancrage local, ou encore pour le bien-être de leurs salariés ou fournisseurs de matières premières.
Au travers de ses achats, qu’il s’agisse de biens ou de services, le consommateur sait qu’il peut contribuer à la pérennité de son écosystème. À contrat de base équivalent, il va de plus en plus privilégier les choix les plus valorisants pour lui, car il donne ainsi une forme d’utilité sociale à son acte consommatoire – une quête mesurable dans les études d’opinion. Des marques comme Lu, Nestlé avec Herta, Lesieur avec Fleur de Colza ou encore Nutella face à la crise du palme, ou encore la lessive Le Chat ou Lush dans les cosmétiques, l’ont bien compris. Elles ont trouvé comment mieux faire adhérer leurs clients en communicant sur leur engagement RSE.
Ne nous méprenons pas : leur succès montre qu’il s’agit là d’une tendance lourde, qui se répand dans toute la société, bien au-delà des CSP+ ou des écolos-bobos. Il est donc temps pour les marques de penser à leur « brand utility »1 en termes de levier pour leur stratégie marketing. Et d’apprendre à valoriser leurs progrès sur les canaux où les attendent leurs clients, notamment ceux de la conversation et de l’échange horizontal.