Unilever, diversité tous azimuts
10/04/2020
Unilever fait de la diversité et de l’inclusion une priorité. Ses initiatives portent sur la promotion des femmes, l’intégration des handicapés et des jeunes de banlieues défavorisées. Une matinée organisée par l’Ilec le 13 mars a été l’occasion pour Frédéric Faure, DRH Europe de l’Ouest, accompagné de Laurent Molinier, secrétaire du CSE et délégué CFDT, d’exposer la politique du groupe.
La diversité est un impératif pour Unilever[1] depuis que lord Lever, l’un des deux fondateurs, décida de confier aux autochtones le développement des implantations locales, quand le groupe entra dans l’ère de l’internationalisation. « Pour l’activité de la société et pour justifier sa présence dans différents pays, les équipes doivent être à l’image de nos consommateurs, explique Frédéric Faure. La diversité est un sujet porté par tous les salariés, elle est source de travail en commun. Elle est au centre de notre culture. »
“50 % de femmes au sommet”
La parité dans la promotion et la rémunération est un premier axe. « Si nous avons plus de femmes que d’hommes dans l’entreprise (56,4 % ), la proportion varie selon les métiers », indique Frédéric Faure. Comme le précise Laurent Molinier, « les femmes sont moins nombreuses dans les forces de vente, car ce métier exige une présence difficilement conciliable quand elles ont des enfants », en revanche « le marketing est quasi exclusivement féminin ». L’enjeu est « la diversité positive dans les deux sens, ne pas viser de manière obsessionnelle le 50-50 mais s’en approcher », renchérit Frédéric Faure. La parité est atteinte depuis peu au comité de direction France : « C’est un grand succès, après des années d’effort : 50 % des managers sont des femmes. » Sur le plan salarial, le groupe frôle la parité avec 92/100 à l’index Egapro[2]. Et puisque la parité concerne aussi les hommes, Unilever leur accorde 24 jours de congé paternité.
En 2020, l’objectif est de renégocier l’accord égalité professionnelle : « Un sujet qui nous tient à cœur, explique Frédéric Faure, car il concerne le plafond de verre pour les femmes et leur accession aux métiers les plus élevés. L’homme a deux fois plus de promotion que la femme, car la femme hésite à accepter la promotion ; sa vie est riche de responsabilités, elle éduque les enfants et a peur que l’investissement que lui demanderait un nouveau métier ne lui permette plus d’équilibrer vie familiale, vie professionnelle. » La solution consiste à identifier les potentiels et à développer un accompagnement pour leur permettre de se sécuriser et d’oser davantage dans leur carrière.
Entreprise « handiaccueillante »
Depuis la loi de 2005[3], les entreprises doivent prendre des mesures pour l’intégration de travailleurs handicapés. « Unilever déploie des initiatives depuis une quinzaine d’années, se souvient Frédéric Faure, pour montrer que le handicap est partout dans l’entreprise : il est parmi nous et on ne le savait pas. » Au siège, 4% des salariés sont handicapés ; l’objectif est 6 % dans cinq ans. Il faut permettre aux salariés de « se déclarer en situation de handicap sans peur d’être jugés ».
Unilever a agi dans trois directions. Par des campagnes de sensibilisation, en faisant venir des témoins incarnant de « vraies leçons de vie, comme Philippe Croizon, qui sans bras ni jambes réussit des exploits dont les quatre détroits à la nage ». Par le maintien en emploi de « tout salarié qui a rencontré un problème de santé grave qui l’a rendu handicapé, tout (étant) fait pour le conserver et lui permettre de s’y épanouir ». Enfin, par le recrutement de salariés en situation de handicap. « C’est un défi, reconnaît Frédéric Faure, car si cela ne pose pas de problème pour les agents de maîtrise, grâce en particulier au partenariat avec notre agence d’intérim Manpower, nous avons plus de difficulté à recruter des cadres et managers. » Unilever a noué un partenariat avec l’université Dauphine et l’Edhec pour accueillir des élèves handicapés. L’entreprise leur ouvre ses portes pour qu’ils puissent la découvrir et candidater.
Illustration de l’implication des salariés, une équipe marketing a eu l’idée d’accompagner quatre athlètes handicapés moteur qui souhaitent être présents aux Jeux olympiques 2024 : Théo Curin (“team ice cream”), Charlotte Faibank (“team beauty & personal care”), Alex Portal (“team foods and tea”), Lucile Razet (“home care”). « Chaque salarié est rattaché à ces athlètes dans son “team” ; une osmose doit se créer. Dans le futur on voudrait des handicaps pas seulement moteur. »
En 2019[4], trois cents salariés ont fait un tournoi de basket en fauteuil roulant, pour être, explique Frédéric Faure, « en situation de handicap pour mieux comprendre ».
Le plan 2020 prévoit la négociation de l’accord handicap. Une commission regroupe des salariés, des personnes handicapées et des élus du CSE. Le groupe entend accélérer dans les cinq prochaines années le recrutement de handicapés en sollicitant des managers bac +5, et développer avec les écoles des cursus de formation. Pour la sensibilisation, le programme Duoday, initié par les pouvoirs publics, propose à un salarié du siège volontaire de consacrer une journée à une personne handicapée pour lui faire découvrir l’entreprise : « une opportunité pour elle de reprendre confiance et de s’engager dans un cursus ». « Nous souhaitons également poursuivre notre travail sur le maintien dans l’emploi, souligne Frédéric Faure : quand un salarié a un incident de la vie, il doit pouvoir continuer à travailler dans l’entreprise ; il en va de la crédibilité de notre projet ».
Soutien aux jeunes défavorisés
Unilever est membre associé d’Atout jeunes université, au côté de Danone et de L’Oréal, sur les campus de Cergy-Pontoise, Paris-Est Créteil, Paris-Est Marle-la-Vallée et Paris-Saint-Denis, pour favoriser l’insertion professionnelle des étudiants d’universités et leur donner les mêmes chances qu’à ceux des grandes écoles. « Après avoir été la première société à accompagner Richard Descoings quand il ouvrit Sciences Po aux jeunes de quartiers défavorisés, explique Frédéric Faure, Unilever soutient, depuis dix ans, la Fondation Dauphine, avec le même objectif : donner aux jeunes des heures de cours supplémentaires, des actions de formation, de découverte pour passer des concours. » Grâce à ces actions de parrainage, d’apports financiers et de cours complémentaires avec l’accord des enseignants « les meilleurs élèves restent dans ces lycées ». Unilever a travaillé deux ans avec l’Éducation nationale et les classes de BEP « afin de montrer aux jeunes ce qu’est une entreprise lors de stages de découverte ». L’objectif est de « réveiller les capacités de leadership des jeunes ». « Mon rêve, avoue Frédéric Faure, serait de créer un CFA force de vente pour recruter des talents chez nous. »
Dernier sujet, Unilever lance l’opération « #MontrezNous » avec une université de Cergy-Pontoise et des étudiants dans le cadre d’un projet tutoré : comme sept femmes sur dix ne se sentent pas représentées dans les médias et les publicités, « Dove s’associe avec Getty Images et Girlgaze pour #MontrezNous, la première banque d’images publiquement accessible afin de faire voler en éclats les stéréotypes de la beauté ». Elle Rose, mannequin et militante transsexuelle, y montre que la beauté n’est pas binaire. « Le changement d’état d’esprit ne se fait pas en deux jours, conclut Frédéric Faure, cela fait quinze ans qu’on y travaille. »