Vie des marques

Réemploi

Coca-Cola, vers la consigne mixte

08/01/2025

Expert en consigne dans les cent mille points de vente du circuit cafés-hôtels-restaurants, Coca-Cola relève le défi logistique de la consigne en grandes surfaces. Entretien Olivier Larose, directeur associé du développement durable, Coca-Cola Europacific Partners France.

Quelle est la politique emballages de Coca-Cola en France ?

Olivier Larose : Notre enjeu stratégique prioritaire est la baisse de nos émissions de gaz à effet de serre. Nous visons un « net zéro » pour l’ensemble de nos « scopes » en 2040, avec comme première étape en 2030 la réduction de nos émissions de 30 % par rapport à 2019. Nous avons déjà diminué nos émissions de 16 % en 2023 sur toute la chaîne de valeur (les trois scopes) : une fierté, puisque c’est au travers d’actions collectives avec nos partenaires et nos clients que nous en sommes là. C’est également le résultat d’un travail d’amélioration continue dans toutes nos opérations industrielles et sur l’ensemble de nos sites (installation de panneaux solaires, géothermie, flotte électrique, etc.). Et nous continuons.

Les emballages représentant 46 % de notre empreinte carbone, nous avons un plan structuré et ambitieux pour réduire leurs émissions. La stratégie réduction, réemploi et recyclage répond à cet enjeu.

Comment le réemploi s’inscrit-il dans cette démarche 3R ?

O. L. : La consigne des bouteilles en verre est dans l’ADN de Coca-Cola en France, historiquement avec la gamme Coca-Cola dans le « hors-domicile » (CHR). Une fois consommées, les bouteilles sont collectées et stockées par les restaurateurs, puis récupérées par nos grossistes avant de revenir dans nos usines, afin d’être lavées et nettoyées, puis remplies à nouveau pour une nouvelle commercialisation. Depuis avril 2022, la totalité de nos marques sont distribuées en verre consigné en CHR. Les consommateurs Français peuvent ainsi retrouver dans leurs établissements les bouteilles de Coca-Cola dans leur format 33 cl, mais aussi les marques FuzeTea, Tropico, Fanta, Sprite et Minute Maid, dans de nouvelles bouteilles de 25 cl à format universel. Nous avons travaillé aux côtés des professionnels de la restauration pour relever ce qui était un grand défi logistique, car nous sommes distribués dans plus de cent mille points de vente. L’ambition est validée : 200 millions de bouteilles sont réemployées chaque année. Chaque bouteille en verre consignée peut-être réutilisée  vingt-cinq fois en moyenne et émet jusqu’à 77 % moins de CO2 que le verre à usage unique.

Aujourd’hui, nous accélérons sur l’économie circulaire de nos emballages, en parallèle de l’incorporation croissante de matière recyclée. Nous avons annoncé en 2023 et 2024 un investissement de 146 millions d’euros sur notre site de Grigny, en Essonne, afin d’en faire notre centre industriel d’excellence en Île-de-France. Nous allons notamment y installer la ligne de production de verre consigné la plus rapide et la plus flexible de France, qui pourra embouteiller jusqu’à 60 000 bouteilles par heure, dans tous les formats existants et pour toutes nos marques.

Nécessaire interopérabilité entre enseignes

En quoi votre expérience de la consigne avec les CHR est-elle un atout ?

O. L. : Le maillage du territoire avec l’ensemble des établissements qui distribuent nos boissons en format consigné nous a permis de rencontrer quasiment tous les cas de figure possibles, et d’avoir beaucoup de remontées du terrain. Notre expérience de la consigne en CHR nous a également appris beaucoup sur les schémas logistiques. Forts de cette expérience, nous menons également des expérimentations de consigne pour réemploi en grande distribution.

Pouvez-vous décrire vos premières expériences de réemploi en GMS ?

O. L. : Concrètement, nous menons des expérimentations de consigne pour réemploi dans plus de 350 points de ventes, avec nos marques Coca-Cola Original et Coca-Cola sans sucre (disponibles en format 1 litre verre consigné). Nous sommes présents dans différentes types de points de vente, des hypermarchés et des supermarchés, mais également des magasins de proximité.

Quels sont les premiers résultats ?

O. L. : L’adhésion des consommateurs va prendre du temps. Ils ont besoin d’identifier le réemploi. Il nous revient de renforcer la sensibilisation, la pédagogie, la visibilité, et de faire que l’expérience d’achat soit facile, simple et attrayante. Le consommateur doit aussi s’identifier au réemploi, donnant du sens à une démarche engagée. Le réemploi doit être désirable ! C’est aussi pour nous, marques et distributeurs, l’opportunité d’ancrer le geste de retour dans le quotidien des consommateurs, dans la perspective d’une consigne mixte dans les prochaines années. Cela servira également à améliorer le taux de collecte des emballages, ainsi qu’à la réduction des déchets abandonnés. D’après une enquête récente, 92 % des Français sont favorables au retour de la consigne pour emballages de boissons. Nous savons qu’il y a un véritable intérêt et une attente des consommateurs. Il est essentiel de mener un travail collectif avec nos partenaires distributeurs pour trouver la meilleure proposition de valeur.

L’interopérabilité entre enseignes est-elle un enjeu ?

O. L. : Bien sûr, c’est l’enjeu, car pour développer la consigne le processus doit rester simple pour les consommateurs. L’interopérabilité entre les enseignes et un maillage territorial dense en seront les clés. Nous testons de nouveaux angles de collaboration avec nos partenaires distributeurs, ainsi que dans le passage à l’échelle au travers de la démarche « ReUse » portée par Citeo. La juste et équitable répartition des coûts entre acteurs est également un facteur de succès, en cohérence avec les responsabilités opérationnelles et réglementaires de chacun.

Comment optimiser le système du réemploi ?

O. L. : De manière générale, il faut continuer à promouvoir le geste de la consigne. Il est bien ancré dans d’autres pays, et en Alsace, mais les Français, bien qu’en faveur de son retour, s’en sont déshabitués. L’ensemble des leviers évoqués précédemment permettront d’y contribuer, tout comme l’accélération d’une démarche collective, permettant de massifier et de créer des synergies. Le mouvement collectif permettra d’aller plus loin, en testant, en apprenant et en améliorant.

Un même geste pour deux types de consigne

Le fait d’avoir un emballage iconique est-il un frein ?

O. L. : C’est en permettant aux consommateurs de retrouver leurs marques ou produits préférés ou iconiques, comme la célèbre bouteille « Contour » de Coca-Cola, que nous réussirons collectivement à créer progressivement leur adhésion au geste de la consigne. En CHR cohabitent les bouteilles des marques Coca-Cola en 33 cl et nos bouteilles universelles de 25 cl, qui permettent d’accueillir chacune de nos autres boissons (FuzeTea, Fanta, Sprite, Tropico et Minute Maid) dans un seul et même parc d’emballages, pour massifier et faciliter les opérations.

Le système est encore en construction : vers quel modèle devra-t-on se diriger ?

O. L. : Le modèle d’avenir est une consigne mixte : pour réemploi et pour recyclage. Il s’agit du même geste pour le consommateur. Ces deux modèles parallèles, qui existent notamment en Allemagne, vont dans le même sens : la mise en place d’une consigne pour recyclage (PET et canettes en aluminium) nous permettra de renforcer le développement de la consigne pour réemploi, en généralisant le geste de la consigne et le reflexe du retour chez les consommateurs.

En complément des autres leviers « 3R », la consigne pour recyclage est le seul levier qui permettrait, collectivement, d’atteindre le taux de collecte de 90 % de bouteilles plastique en 2029 (taux imposé par la réglementation), alors qu’il plafonne aujourd’hui à 60 % pour les bouteilles en plastique et à 37 % pour les canettes en aluminium. Ce modèle a fait ses preuves à l’étranger : en Europe, seuls des pays ayant déjà mis en place la consigne pour recyclage dépassent les 90 % de collecte. Cela a aussi un effet positif et significatif sur la réduction des déchets abandonnés, en donnant une valeur à l’emballage vide.

Propos recueillis par Jean Watin-Augouard

Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur notre site. Si vous continuez à l'utiliser, nous considérerons que vous acceptez l'utilisation des cookies.